LA TABLE POTAGÈRE
Encore peu connue au Québec, la table potagère est un meuble de jardinage qui permet à l’utilisateur de jardiner debout ou assis, d’une façon ergonomique. Il s’agit d’un potager sur pied, adapté pour les petits espaces et les endroits où la plantation au sol est impossible ou trop contraignante. Cette façon de jardiner offre de multiples possibilités dont, entre autres, l’accessibilité à tous.
Le but de cette fiche est simplement d’explorer un peu plus en détail certains aspects de ce type de potager.
Bac ou table ?
En fait, une table potagère est tout simplement un bac de culture sur patte. À quel moment ce bac prend-il le nom de table ? Hum… difficile de répondre à cette question, mais disons que lorsque les dimensions du bac permettent de jardiner confortablement, assis ou debout, que la surface de culture offre la possibilité de cultiver plusieurs plantes et que le support du bac peut porter le nom de patte ou de pied, alors nous y sommes. En fait, la table potagère peut prendre de multiples formes, styles et dimensions. Mais pour être digne de cette appellation, deux points sont importants : la conception doit être faite avec un souci d’ergonomie pour l’utilisateur et l’ouvrage doit fournir les conditions nécessaires (dimensions, etc.) pour soutenir une production agronomique digne d’un potager.
Pour la ville ou la campagne ?
La table potagère est un ameublement de jardinage pour tous les lieux de vie. Si elle est la solution idéale pour les petits espaces bétonnés et construits, elle l’est tout autant pour les grands où il est pratique et agréable d’approcher le potager de la maison, de la cuisine et de l’espace de vie. La table potagère est tout simplement une méthode additionnelle de culture pour le jardinier, ne limitons pas son utilisation.
Où placer une table potagère ?
La table potagère peut être placée partout où il y a de la lumière. Cependant, le nombre d’heures d’ensoleillement qu’elle reçoit déterminera ce qu’on peut y produire.
Plus de six heures d’ensoleillement par jour permet la production de légumes fruits tels la tomate, le piment et l’aubergine, qui nécessitent le plein soleil pour être productifs.
Si la table est située à l’ombre ou la mi-ombre, les légumes feuilles comme la laitue, le kale, le bok choy, etc., ainsi que les fines herbes, deviennent les options les plus intéressantes pour avoir une récolte satisfaisante.
De façon générale, la production de feuilles nécessite moins d’énergie solaire que la production de fruits. Pour ce qui est des légumes racines, certains (radis, navets, chou rave, betterave) peuvent donner de bons résultats à la mi-ombre. C’est donc l’essai (et l’erreur) qui donnera l’heure juste pour chaque exposition et situation précise.
Les endroits chauds, comme un stationnement, un patio ou un mur au Sud et une terrasse sur un toit, stimulent la croissance des plants et leur productivité. De nombreuses plantes potagères (tomate, aubergine, concombre) bénéficient de cette chaleur pour leur développement ; une chaleur également transmise aux racines, qui prennent souvent du temps à se réchauffer en plein sol au printemps.
La table potagère permet d’élargir les possibilités d’installation d’un potager, en sortant des sentiers battus et choissisant des endroits non traditionnels. Très intéressant pour le jardinier amateur, ce type de potager peut être exploité par les entreprises pour leurs employés, par les commerces pour leur clientèle, par les écoles comme outil pédagogique, par les municipalités pour leurs citoyens, etc. ; sa simplicité et, selon le cas sa mobilité, en facilitent l’usage !
Substrat de culture
Le premier conseil est de ne jamais utiliser de la terre de plein champ. La terre n’est pas un produit adapté pour la culture en pots ou en bacs. C’est une mauvaise idée !
Utilisez un substrat de culture de qualité, conçu spécialement pour la culture en contenants. Celui-ci procure aux racines un équilibre physico-chimique (rétention d’air, rétention d’eau, pH, sels minéraux et plus) adéquat pour la croissance des racines des plantes. Sans être obligatoire, l’ajout de compost permet de stimuler la vie microbienne du substrat ; bénéfique à la croissance des plantes. Si du compost pur (ex. : compost maison) est ajouté, ne pas dépasser une quantité supérieure à 15 % (en volume) du mélange.
Éviter la « terre noire » en sacs ou en vrac, un produit pauvre, souvent acide, de piètre qualité et qui étouffe les racines.
Que faire avec le substrat après une ou plusieurs années de culture ?
Il n’y a pas de règle !
Dans une table potagère, si la fertilisation est adéquate, le substrat de culture de départ devrait donner de bons résultats de croissance durant plusieurs années.
Lors de son vieillissement, les fibres végétales du substrat (sphaigne, écorce, coco, etc.) se décomposent et créer un milieu plus étouffant pour les racines. Au point de vue chimique, le pH du substrat peut s’éloigner de la norme, comprise entre 5,5 et 6,5, et nuire à la bonne disponibilité des éléments minéraux. De plus, le substrat tend généralement à s’appauvrir en sels minéraux, mais parfois, en accumuler certains. La réalité est bien plus complexe, sans compter l’activité biologique qui évolue. Ce qu’il faut retenir c’est que le substrat vieillit et qu’il devient moins performant pour la croissance des plantes avec le temps, que la vitesse de dégradation dépend du substrat de départ utilisé et de sa gestion en cours de culture. La décision de le changer devient donc du cas par cas. Le consommateur n’a pas tous les outils (analyse de sol, pH-mètre et conductivimètre) ni les connaissances des professionnels pour faire les ajustements adéquats. Donc, les recommandations doivent rester facilement applicables pour lui.
L’ajout en surface de quelques centimètres de compost, en début de saison, permet d’apporter un supplément de matière organique et de stimuler sa vie microbienne. Le compost favorise également l’absorption et la rétention d’eau. C’est donc une bonne chose.
Après quelques années, on peut enlever 1/3 du substrat de surface pour le changer par du nouveau. Aucune recommandation n’est bonne pour tous. Dans tous les cas, si la croissance des plantes est suffisante (avec une fertilisation adéquate), il n’est pas nécessaire de changer le substrat. Après plusieurs années, je dirais 4 -5..7, très variable selon les situations et les produits, il est bon de remplacer complètement le substrat. Bien entendu, on récupère le vieux substrat ailleurs au jardin, comme amendement.
Dans les grandes tables… les meilleurs potagers !
Un bon conseil à donner est d’éviter le piège des mini tables potagères. Si elles sont jolies et paraissent pratiques à l’achat, l’espace de culture est rapidement comblé par les plantes et les besoins d’arrosage fréquents. En fait, les petites tables se rapprochent plus de la culture en pot que de la culture sur table.
Il n’y a pas de règle bien établies pour les dimensions d’une table potagère. Je recommande un bac avec une profondeur minimale de 30 cm et une surface de plantation d’un mètre carré et plus. À partir de cette dimension, la table devient intéressante et plus facile à cultiver. À l’intérieur des balises ergonomiques pour l’usager, plus la table est grande et profonde, plus la culture sera facile. Pour plus de détails, voir la section « réaliser une table potagère ».
La fertilisation
Il faut fertiliser régulièrement les végétaux durant la saison de croissance. Vous pouvez utiliser différents types d’engrais : liquide, soluble, granulaire, organique, synthétique, etc., à chacun son choix. Ne pas oublier que l’ajout de compost au substrat réduit les besoins en fertilisants durant l’année d’application. Comme chaque source de fertilisant est différente, il faut suivre les recommandations du fabricant et bien observer la croissance des plantes. Pour les engrais granulaires, mieux vaut fractionner leurs applications, que d’appliquer trop d’engrais en une seule fois. À noter que les engrais solides à base organique doivent se décomposer pour libérer une partie de leurs éléments fertilisants. Leur action est donc moins rapide que les formes solubles ou liquides. Comme il est plus facile d’ajouter de l’engrais que d’en enlever, en cas de doute, fertiliser moins et en ajouter à nouveau si la croissance des plantes n’est pas suffisante, ou que le feuillage tend à jaunir. Il existe beaucoup de produits sur le marché. Chaque compagnie à sa stratégie de commercialisation. Avant de faire un choix, il est important de regarder la composition chimique et organique de chaque produit et de les comparer. Les prix peuvent être très variables pour des apports similaires en matières fertilisantes.
La vérité sur la fertilisation foliaire !
L’absorption foliaire des engrais est un processus très complexe, qui varie selon une multitude de facteurs physiques, chimiques, physiologiques et environnementaux. Les résultats de recherches divergent sur les effets positifs ou non de cette pratique.
Il est important de savoir que la quantité d’engrais qui peut entrer dans une feuille est infime. Seules certaines formes chimiques peuvent pénétrer la feuille et pour se faire, le feuillage doit rester mouillé très longtemps, des heures. Pour l’azote, seule l’urée a le potentiel d’entrer par la feuille.
La fertilisation foliaire n’est à envisager que si les racines ne fonctionnent pas (ex. : pourriture) ou que le pH du substrat interfère avec disponibilité des éléments minéraux. Si la fertilisation foliaire est envisagée, cette pratique est plus appropriée pour apporter des éléments mineurs (oligoéléments), nécessaires en petite quantité à la plante, que pour les éléments majeurs (N-P-K, Ca, Mg). Le point à retenir est qu’il est impossible de combler les besoins de la plante par les feuilles.
À noter que le feuillage peut absorber d’autres substances, telles des phytohormones, des acides organiques, etc., de plus en plus présents dans certains produits foliaires. Toutefois, cette pratique ne peut être considérée comme une véritable fertilisation. Il est alors plus juste de parler de biostimulants ou de phytostimulants. Dans tous les cas, toujours faire des essais afin de vérifier l’efficacité réelle du produit.
Désherbage
Lorsqu’un substrat de départ de qualité est utilisé, la table potagère ne nécessite pratiquement aucun désherbage. Avec le temps, ce sont les fruits non récoltés et certaines fleurs (ex. : tomates cerise, pensées, etc.) de nos cultures qui deviennent la source de « mauvaises herbes ». Dans tous les cas, l’élimination des jeunes plants indésirables est facile et demande peu d’effort. Le truc est de toujours éliminer les plants au fur et à mesure de leur apparition, ce qui est d’autant plus facile que nous n’avons pas à nous pencher. La situation est bien différente du désherbage en plein sol, où une banque de semences est naturellement présente dans la terre.
Irrigations
L’irrigation des tables potagères est facile. Au début, il s’agit d’apporter de l’eau lorsque les premiers centimètres de substrat deviennent secs. Plus les plantes se développent plus nous pouvons nous permettre de laisser s’assécher le substrat en profondeur, sans jamais toutefois laisser les plantes fanées. Souvent, le problème du débutant est de trop arroser. Ne pas oublier que les racines ont besoin d’air pour bien fonctionner.
Il n’y a pas de recette pour les fréquences d’arrosages, le volume de la table, son exposition, le volume du substrat et sa composition, la densité du feuillage, le type de plantes, etc., sont tous des facteurs qui influencent l’assèchement est les besoins en eau.
Mieux vaut espacer des irrigations faites en profondeur, que de faire de nombreuses irrigations superficielles. L’arrosage en profondeur permet de favoriser le bon développement racinaire et permet la migration des éléments minéraux déposés en surface (si des engrais granulaires sont utilisés) du substrat. Afin de prévenir le développement de maladies, toujours effectuer les irrigations assez tôt en journée, pour permettre au feuillage de s’assécher avant la nuit. De façon générale, l’autonomie d’irrigation d’une table potagère devrait permettre à son propriétaire de partir les fins de semaine. Sinon, est-ce une table potagère ? Poser la question est y répondre.
Certaines tables sont munies d’une réserve d’eau à leur base. La présence cette dernière permet d’espacer les besoins en irrigation. La plupart du temps, la réserve prend la forme d’un double fond étanche, utilisant comme mèches des tissus hydrophiles ou de petits puits de substrat, afin d’assurer la remontée de l’eau par capillarité. La plupart du temps, les racines vont aller directement puiser dans cette réserve, mais la structure de ces dernières sera quelque peu différente, afin de s’adapter aux conditions aqueuses.
Il ne faut pas penser qu’une pluie remplace une irrigation. Une bonne quantité d’eau est nécessaire pour bien arroser une table potagère et peu de pluies sont suffisamment abondantes pour le faire.
L’installation d’un système d’irrigation goutte à goutte est un moyen simple et efficace pour simplifier l’irrigation de la table. L’utilisation de valves électriques, gérée par un petit contrôleur d’irrigation, rend l’installation indépendante.
Si possible, privilégiez la récupération de l’eau de pluie pour l’arrosage. De ce fait, la table contribue à la gestion des eaux pluviales.
Truc !
L’application d’un paillis à la surface du substrat permet de réduire l’évaporation de l’eau et les besoins en irrigation. Toutefois, comme ce ne sont pas toutes les plantes qui tolèrent la présence de paillis à la base de leurs tiges ou de leurs feuilles (risque de pourriture), il est bon de dégager la base des plants lors de la mise en place du paillis.
Choix de plantes, pour un maximum de productivité !
Choisir des fruits et légumes au port compact. Explorer le rebord de la table avec des herbes retombantes ou encore avec des potagères à fruits, dont le plant peut cascader (plusieurs cultivars de tomate de type cerise ou raisin ont ce type de port). Faite des récoltes successives, ex : radis, bok choy, laitues et épinards peuvent se succéder. Ne pas oublier d’ajouter une touche florale, afin d’attirer les pollinisateurs et les insectes bénéfiques. Une table jolie sera également plus attirante pour les utilisateurs.
La gestion de l’espace sur une table potagère est différente que celle d’un potager au sol. Comme nous cherchons à optimiser davantage l’espace de culture, un contrôle du feuillage est nécessaire. Par exemple, il faut récolter rapidement les feuilles externes des légumes feuille, afin d’éviter que les plants ne deviennent envahissants. Pour les légumes fruits (tomate, piment, aubergine, etc.), ne pas hésiter à couper des feuilles et quelques tiges pour permettre une meilleure pénétration de la lumière et une plus grande circulation de l’air. Les légumes feuilles à production rapide (bok choy, laitue, épinard, etc.) sont à récoltés dès qu’ils sont prêts. Vaut mieux récolter certains produits dès qu’ils sont prêts (basilic, laitue, bette à carde), les mettre au frigo ou les congeler, plutôt que d’attendre d’en avoir besoin ! Aux risques qu’ils prennent trop d’espaces.
Plusieurs légumes aiment le froid. En fin de saison, kale, épinard, radis et roquette sont de bons produits pour étirer la saison et ils poussent rapidement. De nombreuses fines herbes (thym, sauge, persil et romarin) bravent facilement les premiers froids.gmenter la surface de production ! L’ajout de caissettes murales sur les rebords de la table est un moyen qui permet d’augmenter la surface de production. Ces caissettes peuvent être utilisées pour la production de nombreuses fines herbes.
Pourquoi ne pas jouer avec des thématiques !
Une table BBQ :
Thym, romarin, persil, origan, basilic pourpre et vert, capucines et souci près du BBQ, pour aromatiser et de décorer de belles assiettes de grillades véganes ou autres.
Une table Salsa :
Tomates cerises, coriandre, petits piments forts et doux, persil, ciboulette ail et fraises (cultivars plus petits pour pots).
Une table Ratatouille :
Aubergines et courgettes Zucchini (choisir des cultivars compacts, adaptés pour la culture en pot), ciboulette ail, tomates raisins, petits piments forts, thym et basilic. Un seul plant de courgette Zucchini est nécessaire et le placer sur un coin de la table, pour qu’une grande partie du feuillage soit à l’extérieur de la table.
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Les informations de cette fiche sont à titre indicatif et ne représentent en aucun cas des recommandations.
Crédit photo : Claude Vallée, agr. M.Sc Professeur en horticulture Institut de technologie agroalimentaire du Québec (ITAQ), Campus de Saint-Hyacinthe